tarmac

le paysage du rien

 

A force de « sécurité et de confort » on a réussi ç faire en sorte de passer  du taxi à l’avion sans jamais humer l’air du pays, cavalant de hall climatisés en couloirs fermés jusqu’à une boite en aluminium percée de petites fenêtres, qui s’envole, et vous envoie dans un autre pays, un autre hall climatisé, un bus, un taxi, un train, et, devant le parvis de l’hôtel, enfin la découverte de cet ailleurs. C’est une traversée en « tube », en gazoduc. Délivré à domicile.

Dans les pays pauvres, ça arrive moins : pas d’argent pour faire des tunnels qui vous emmènent à l’avion, ces messieurs dames  sont prisé de descendre à pied et de marcher sur le goudron. Parfois il m’est arrivé de récupérer mon bagage au pied de l’avion et de repartir avec : Hè ! c’est encore le moyen le plus rapide de récupérer son bagage, tu savais ? Le low-cost a du bon quand il nous fait toucher terre. Les parkings d‘avions sont une démesure : du goudron à perte de vue, une horizontalité parfaite, pas un arbre pour créer de l’ombre ; l’espace en deux dimensions le plus dingue que l’humanité ait jamais créé. Je ne vois pas trop d’équivalent, à part quelques places minérales (Tien an men  à Pékinh ?) mais ici, attention, pas de façades pour donner « une forme à l’espace ». L’horizon est vide, on est sur un océan minéral. Le temps limité de notre présence le rend  plus excitant.

J’ai habité dans un désert de cailloux, près d’un aéroport : Le vide créé par l’homme est différent du vide de la nature.  On sent intrinsèquement que le tarmac a une finitude, alors sans en voir  les limites. C’est une connaissance intrinsèque de la nature des choses ; on y marche avec la volonté d’aller au bord, mais aussi avec celle d’observer chaque mètre carré et de comprendre son histoire et on s’émeut  des herbelettes perleuses qui ont réussi à pousser dans les fissures. Dans un album des petits hommes, le héros est confronté à une mer couverte de dalles blanches, dont il ne voit pas l’extrémité, et qu’il doit traverser, sans savoir dans quel sens, pour aller chercher de l’autre côté, une réponse à ses questions. Dans Neo Surf, de Gener8ion, les héros chassent les autruches à coup de sabre sur un aéroport abandonné. L’émotion plastique du tarmac, c’est du tabasco.

tête de phare
ile d'yeu